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Question de Mme Laure Darcos (Essonne - Les Indépendants) publiée le 11/04/2024

Question posée en séance publique le 10/04/2024

M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour le groupe Les Indépendants - République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

Mme Laure Darcos. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Madame la ministre, Shemseddine avait 15 ans. Il sortait de son cours de musique quand il a été tabassé à mort par plusieurs jeunes encapuchonnés pour la simple raison qu'il fréquentait une jeune fille et que cela déplaisait aux frères de celle-ci.

Présente, comme vous, vendredi sur les lieux de ce meurtre barbare aux côtés de mon ami Jean-Marie Vilain, maire de Viry-Châtillon, j'ai croisé à la sortie du collège ses camarades, en pleurs, incrédules et terrorisés. Malgré leur désarroi, ils posaient tous la même question : « À qui le tour ? ».

Au coeur d'une société déboussolée, l'école a vocation à être un sanctuaire de la République, formant génération après génération nos enfants au respect mutuel et aux droits humains élémentaires, où les élèves comme leurs professeurs se sentiraient en sécurité.

Les communes ne cessent d'investir dans les quartiers populaires pour que chacun, dans sa différence, vive en harmonie avec les autres. L'effort consenti est colossal. Je peux témoigner que le maire de Viry-Châtillon et son équipe développent de nombreuses actions dans leur ville pour que les habitants s'y sentent heureux.

Alors, que faire de plus ? Que faire de mieux ? Comme vous tous ici, je me sens découragée devant l'ultraviolence de mineurs de plus en plus jeunes. Ceux-ci perdent le sens du bien et du mal, notamment à travers les réseaux sociaux, qui influencent leurs comportements et répandent de manière virale des rumeurs abjectes sur leurs camarades.

Pouvons-nous accepter de cette jeunesse une haine des forces de police, des pompiers, des élus et de leurs enseignants ? Pouvons-nous nous habituer à cet ensauvagement, qui vire à la barbarie ordinaire ?

Bien sûr, il faudra punir ces assassins très sévèrement et, autour d'eux, rappeler qu'en France il existe un devoir fondamental de respect de la vie d'autrui.

Par ailleurs, en 2024, l'infantilisation des femmes par un patriarcat moyenâgeux n'a pas sa place dans la République, et l'éducation à la sexualité à l'école doit pouvoir être enseignée en toute sérénité.

Notre indignation ne ramènera pas Shemseddine à la vie. Sa maman, une veuve courageuse, son frère et sa soeur sont brisés à tout jamais. Pouvons-nous espérer que ce drame serve à une véritable prise de conscience et à un sursaut collectif ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC, RDSE, RDPI et SER.)


Réponse du Ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse publiée le 11/04/2024

Réponse apportée en séance publique le 10/04/2024

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Mme Nicole Belloubet, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice Laure Darcos, je sais que vous vous êtes rendue à Viry-Châtillon ; nous y étions à peu près au même moment. Je partage votre émotion, ayant eu l'occasion de parler avec la maman de Shemseddine qui m'a dit combien elle était, comme nous tous ici, anéantie par ce qui s'est passé. Et j'ai la volonté de tout faire pour que le bouclier dont je parlais en réponse à une précédente question d'actualité soit effectivement mis en place.

Vous vous demandez, madame la sénatrice, ce que nous pouvons faire de plus. Je crois que nous ne devons en aucune manière nous décourager. Nous devons continuer à nous arc-bouter pour que l'école soit un sanctuaire, non pas totalement fermé, mais un sanctuaire qui protège les jeunes et la communauté éducative, et qui permette de construire des ponts vers l'extérieur, vers les collectivités qui nous aident tant.

Vous avez cité le maire de Viry-Châtillon, M. Vilain, que je salue ici tout particulièrement pour la mesure de ses propos et pour l'action qu'il conduit. Il a notamment mis en place des cellules de soutien psychologique à la maison des jeunes et de la culture (MJC) de sa ville pour que tous les jeunes, choqués comme ils le sont, puissent venir s'y exprimer en cette période de fermeture du collège pour cause de vacances scolaires.

Pour le reste, au sein même de notre communauté éducative, je veux dire - sans reprendre ici l'ensemble des dispositions juridiques applicables - que l'enseignement fondé sur la science, que l'égalité entre les filles et les garçons, que le respect des valeurs de la République, que le respect entre les jeunes, et notamment entre filles et garçons, que l'éducation à la vie affective et à la vie sexuelle, sont des incontournables que nous nous emploierons à diffuser auprès des élèves.

C'est par la diffusion de ces valeurs républicaines et de nos enseignements scientifiques que nous contribuerons à l'emporter en toute hypothèse. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP.)

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